« La FFAAA œuvre pour la mise en place de projets et d’évènements en faveur du développement de l’aïkido, de sa technicité et de sa pédagogie, sur le territoire français. »
Cette citation, tirée de la rubrique « Qui sommes-nous ? » du site internet de la FFAAA, ouvre le paragraphe présentant ses « Actions fédérales ».
On comprend ainsi que le développement de la technique, tout autant que la nécessité d’unifier l’offre et la qualité de la pratique sur l’ensemble du territoire, est une des raisons d’être de notre maison commune.
Aujourd’hui, avec 40 ans d’expérience, il est peut-être temps de s’interroger sur l’organisation technique fédérale la plus efficiente : laquelle serait la plus profitable à notre pratique ? Quels seraient ses objectifs et la nature de ses moyens d’action ?
Si l’on considère l’histoire de notre fédération, on constate que son organisation technique territoriale a été structurée autour de deux axes principaux :
Un axe de nature horizontale : les ligues qui ont été créées correspondaient aux 22 régions administratives de la France (+3 DOM-TOM), auxquelles était adossée une organisation technique décentralisée.
Un axe de nature verticale, c’est-à-dire du centre – les grands techniciens et cadres nationaux – vers la périphérie – l’ensemble des pratiquants et enseignants de clubs.
Nous reviendrons plus tard sur ce second axe (les relations CTN-dojos), souhaitant nous focaliser aujourd’hui sur le maillage territorial de l’aïkido en France.
« La région du Grand Est, qui regroupe 10 départements, sur un territoire qui fait deux fois la taille de la Belgique ! »
Depuis un peu moins d’une décennie, celui-ci a en effet évolué, puisqu’il s’est calqué sur les limites des 13 nouvelles grandes régions administratives créées par la réforme de 2015. Avec un recul de plusieurs années, nous pensons que cette réorganisation des organes techniques au sein des grandes régions est peu pertinente.
Mis à part quelques exceptions (comme l’Île de France, ou les Pays de Loire, par exemple), les grandes ligues de la FFAAA sont devenues de vastes territoires difficiles à gérer et à irriguer.
Qu’on en juge : un seul DFR (Délégué Fédéral Régional) siège au CTN (Collège Technique National) pour représenter toute la région du Grand Est, qui regroupe trois anciennes régions administratives, soit 10 départements, sur un territoire qui fait deux fois la taille de la Belgique ! Et il en va de même pour d’autres, comme la Nouvelle-Aquitaine, l’Occitanie, ou l’Auvergne Rhône-Alpes.Même avec l’effet démultiplicateur des CTR (il y a un Collège Technique Régional par ligue), seuls les bassins denses de pratiquants connaissent des manifestations fédérales dignes de ce nom, alors que de nombreux territoires clairsemés se retrouvent quelque peu à l’abandon.
Mais, surtout, pratiquants et enseignants ont vu les distances considérablement s’allonger pour se rendre aux stages, aux formations, aux passages de grades. Des distances plus longues qui induisent davantage de temps passé dans les transports, des coûts désormais plus lourds (carburant, péage, hôtel la veille, pour certains), des sacrifices plus conséquents pour la vie de famille (en termes de temps stage-trajets).Bien sûr, les limites de ces investissements sont toujours personnelles : si certains passionnés continuent de parcourir de très longues distances, d’autres ont plus de difficultés à faire 300 à 400 km aller-retour dans une journée ; surtout si c’est 3 ou 4 fois dans l’année.
« Des distances plus longues qui induisent davantage de temps passé dans les transports, des coûts désormais plus lourds… »
Fallait-il donc coller l’organisation technique au découpage administratif des grandes régions ?
Nous ne reviendrons pas sur ce choix, même si l’on peut noter que la FFAB ne l’a pas souhaité, pas plus que les disciplines associées de notre propre fédération. Ce qui compte, désormais, c’est bien de faire évoluer ce cadre.On peut d’abord reconnaitre que les anciennes ligues, meilleures connaisseuses du terrain, perdurent de manière plus ou moins informelle sous l’aspect des CID (Comités interdépartementaux), parfois en soutien d’une grande région, parfois en rivale.
La plupart des grandes agglomérations, qui demeurent les principaux bassins de pratiquants, ont peu souffert de cette réorganisation régionale : les stages et actions fédérales continuent de s’y produire de manière régulière. Mais il en va différemment dans les petites villes et les territoires ruraux, où la FFAAA semble quelque peu absente. N’y demeurent souvent que des initiatives très locales (stages privés, rencontres interclubs, etc.) que les grandes ligues soutiennent rarement, quand elles ne les empêchent pas, comme lorsqu’un stage privé fait doublon avec un stage fédéral situé parfois à plus de 400 km (comme en Nouvelle-Aquitaine ou dans le Grand Est).
« Tout ceci génère souvent incompréhensions et frustrations au niveau local »
Tout ceci génère souvent incompréhensions et frustrations au niveau local. Certes, les grandes régions demeurent des partenaires privilégiés pour discuter avec les autorités administratives en matière d’évènements ou de subventions. Et peut-être que, d’un point de vue organisationnel, nos ligues doivent-elles effectivement se calquer sur ce moule afin de davantage peser. Mais rien n’oblige notre structure technique à s’y adosser.
Dès lors, vers quel système se diriger ?
D’abord, il est primordial de reconnecter les dynamiques et les bonnes volontés locales avec la structure institutionnelle. Organiser des stages privés ou des interclubs locaux devrait être largement accepté pour soutenir les initiatives locales, même en cas de doublon avec des évènements de ligue (une distance-seuil reste à définir).Ensuite, les ligues devraient encourager de façon régulière et officielle des regroupements interclubs ou des actions techniques délocalisées dans les dojos, y compris en soirée. Quelques exemples existent déjà, qu’il faudrait peut-être multiplier : les « soirées de la ligue » en Île de France ; les « cours interdépartementaux » dans le CID Lorraine ; « les interclubs des commissions départementales » dans le CID Alsace FFAAA, les « actions délocalisées de la délégation » Lorraine de la FFAB.
« Mieux irriguer est essentiel »
Mieux irriguer est essentiel et y répondre nécessitera plusieurs options en fonction du découpage régional choisi :
Si l’on devait conserver le découpage actuel (une hypothèse que nous ne souhaitons pas), serait-il possible de laisser la possibilité aux CID de proposer eux-mêmes des actions techniques diplômantes (passage de grade, BF…) ? Toujours dans un souci de plus grande cohérence et proximité.
Doit-on revenir aux anciennes ligues, et donc à nouveau à un CTN plus imposant (27 DFR) ?
Faut-il repenser notre système en fonction, non des régions administratives, mais des bassins de population et de pratiquants ? On peut, par exemple, encourager des synergies entre les clubs frontaliers de deux régions distinctes (souvent éloignées de leurs capitales) afin de créer une dynamique.
Une autre possibilité serait de garder les régions actuelles, mais d’avoir plusieurs DFR à l’intérieur de chacune (un par CID ? ou bien un DFR et 2-3 DFR-adjoints ?).
Tout changement dans l’organisation territoriale de la fédération aura forcément un impact sur l’organisation technique nationale (un CTN plus nombreux ; des liens CTN/CTR à redéfinir ; une refonte de la structure et de l’offre de stages et de formations…), et réciproquement. Nous y reviendrons plus tard.
Mais, en l’état, le maillage technique du territoire national est à revoir, afin que la fédération puisse être visible et agissante partout
Les équilibres sont, bien sûr, délicats à trouver : il faut être en mesure d’impulser à la fois des choix institutionnels fédéraux tout en respectant les bonnes volontés et les dynamiques locales ; il faut concilier les initiatives (forcément limitées) des clubs et la nécessité de fédérer à une plus grande échelle. Nous ne souhaitons nullement « balkaniser » l’aïkido en France (le risque serait de n’avoir plus d’évènements rassembleurs) ; seulement retrouver un certain équilibre entre la volonté de réunir (Aï) le plus grand nombre et ne pas brider les énergies individuelles (Ki).
Collectif Aïkido Avenir (Enseignants investis et pratiquants passionnés, 5e & 6e dan)