Ce diaporama a été réalisé en janvier 2019 à partir de la réflexion collective du Collège Technique National dans le cadre du groupe de travail « Eléments de langage commun » piloté par Franck NOEL.
Quelques grandes orientations
La réalité de notre pratique fait que Uke et Tori sont le même. L'alternance des rôles est un élément incontournable de notre mode opératoire.
Quelques orientations simples se déduisent très logiquement de ce constat:
Les principes et les valeurs régissant le travail de Uke sont les mêmes que pour Tori.
Le travail de Uke tend à developper le même type de personne que celui de Tori.
Aux trois phases de construction de la technique pour Tori (placement, déséquilibre, engagement) correspondent trois phases pour Uke (attaque, gestion de l'équilibre, chute).
Uke est responsable de la qualité du travail au même titre que Tori.
De même qu'il existe différentes formes et différents niveaux de travail, le travail de Uke va revêtir différents aspects selon les circonstances.
Le rôle de Uke: deux composantes à équilibrer
1. La contrainte (une attaque, un comportement offensif) Deux éléments:
Une destination claire au geste d'attaque (une saisie qui saisit, une frappe qui touche, même au ralenti).
Un positionnement sur l'avant orienté vers Tori.
Ces deux éléments, même imparfaitement réalisés, suffisent à créer une situation de travail où les techniques Aïki trouveront déjà un début de logique.
2. Sa propre sécurité
Les comportements tout au long de l'échange:
Trouver le compromis entre la nécessaire prise de risque inhérente à toute attaque et un comportement suicidaire.
Se replacer en fonction des actions de Tori (déplacements, atémis).Être présent sur les points de contact pour tenter de les contrôler (connexion)
Aller dans le sens de l'action, ne pas la refuser.
L'unité du corps:
Avec la même logique et en ajoutant l'unité du corps, l'action de Tori doit se diffuser tout au long de la chaîne articulaire, se diluer dans tout le corps et non se concentrer sur un point, limitant ainsi le risque de traumatisme.
L'acquisition des chutes:
Ces chutes ou arrivées au sol sont la conséquence d'un déséquilibre et/ou d'une action sur une articulation. Une chute "en sécurité" doit donc se faire dans le prolongement de ces actions.
Le rôle de Uke: l'optimisation de la situation de travail
Le sens même du travail de Uke: Créer une situation qui sera profitable au maximum pour les deux partenaires. Il est difficile d'analyser en détail de quoi peut être faite cette optimisation, mais on peut considérer trois grands types de comportements qui se succéderont ou s'entremêleront en fonction des partenaires, de leur niveau, de la nature et de l'intensité du travail.
1. Aider Tori (relation Sempaï / Kohaï) Uke peut aider Tori à s'imprégner des schémas techniques, en guidant Tori vers des directions pertinentes.
2. Ne pas gêner Tori (Ippan geiko: pratique standard) Peut-être l'essentiel à développer et à mettre en œuvre dans le travfail de Uke: donner une impulsion initiale claire (saisie, frappe) pour ensuite se conformer à ce qui est induit par l'action de Tori en restant présent sur les contacts, en dosant la densité, sans anticipation ni éxagération, sorte de neutralité bien différente de la passivité ou de la complaisance. Faire en sorte que la chute soit réellement la conséquence de l'action de Tori, devenir le miroir dans lequel Tori voit se reflèter sa propre action, ayant ainsi la possibilité de s'auto-évaluer dans l'instant.
3. Compliquer la vie de Tori (Go no geiko) Augmenter la réactivité, procéder à des changements d'intensité et/ou de rythme, sortir du schéma technique proposé. En se comportant ainsi Uke créera de l'imprévu et sollicitera la capacité d'adaptation de Tori. Ce travail en "Go no geiko" peut faire l'objet d'une consigne délibérée du Sensei ou surgir à tout moment dans un échange. Il s'agira, bien sûr, pour l'enseignant de rester vigilant et de cadrer ces comportements.
En résumé, trois façons pour Uke d'optimiser la situation de travail:
Aider Tori
Ne pas gêner Tori
Compliquer la vie de Tori
→ Remarquons que dans cette relation d'échange, Tori de la même façon que Uke, optimise situation de travail. Que l'on soit Uke ou Tori, il s'agit donc tout simplement "d'aider son partenaire" ou "de ne pas gêner son partenaire" ou bien encore "de compliquer la vie de son partenaire", tout en sachant où l'on met la barre pour préserver de part et d'autre l'intégrité physique et mentale.
→ Des modes d'applications comme Henka waza et Kaeshi waza peuvent contribuer à développer cette relation d'échange entre Uke et Tori.
La relation Uke / Tori: Henka waza
Illustration du principe d'action/réaction.
On peut, théoriquement, distinguer deux cas de figure:
1. Utiliser le Henka waza pour permettre à Tori de sortir du schéma prévu (Kata) et s'adapter au comportement de Uke.
Ce premier cas fait référence à la notion de waza dans la mesure où l'on n'est plus dans le schéma préétabli: Le comportement d'Uke ne permet pas de réaliser le schéma ou la structure prévue. À partir de cette nouvelle donne Tori sera amené à réaliser une variation de la technique ou un changement de technique. Si les comportements de Uke sont délibérés, il pourra s'agir éventuellement d'une amorce de travail en "Go no geiko"; si les comportements de Uke sont involontaires et trahissent un manque d'expérience, la réponse de Tori (Sensei ou Sempaï) sera essentiellement démonstrative pour corriger Uke.
Difficile de mettre en place une pratique systématique de ce type, car il faudrait demander à Uke d'avoir volontairement des comportements inadaptés.
2. Utiliser le Henka waza pour deévelopper la présence et la réactivité de Uke liées à son relâchement et sa mobilité.
A partir d’un schéma technique plutôt bien réalisé, Tori mobilise Uke, il peut exercer une pression sur son axe. Dans la continuité de cette mobilisation ou en relâchant cette pression (action), Uke garde un comportement offensif (réaction) que Tori exploite pour enchaîner une autre technique :
Il s’agit de développer la relation Uke/Tori. On peut évoquer la notion de Kata (ou de Kihon waza) au début de l’échange dans la mesure où c’est la qualité de la technique initiale qui permet de mobiliser réellement Uke et d’enchaîner une autre technique, en fonction, bien sûr, de la réactivité de Uke et de sa capacité à rester offensif. On développe ainsi la présence et la réactivité de Uke à partir des principes évoqués précédemment : aller dans le sens de l’action, relâcher le haut du buste pour se placer en gardant l’unité du corps. Pour Tori, construction de la technique initiale, écoute et adaptabilité.
La relation Uke / Tori: Kaeshi waza
Les rôles de Uke et de Tori s’inversent au cours de l’échange. On peut, théoriquement, distinguer deux cas de figure :
1. Utiliser le kaeshi waza pour illustrer une faille dans le schéma réalisé par Tori.
Ce premier cas fait référence à la notion de Kata (le schéma, la structure d’une technique) : Un manque de logique ou de fonctionnalité dans cette structure peut générer des ouvertures permettant la réalisation d’un Kaeshi waza.
Dans le cadre de la pratique, sa valeur est essentiellement démonstrative en permettant au Sensei ou au Sempaï de mettre en évidence les carences d’un schéma. Difficile de mettre en place une pratique systématique, car il faudrait demander à Tori de réaliser volontairement un schéma inadéquat.
2. Utiliser le kaeshi waza pour développer chez Uke un supplément de réactivité, de mobilité, d’adaptabilité ou de densité selon le cas.
Ce deuxième cas fait référence à la notion de Waza (Kata mis en musique, réalisé dans un soucis de réalité de l’instant) : Dans un échange « normalement » conduit sur un schéma rigoureux, Uke, par un surplus de mobilité retourne la situation. Il n’est pas question d’exploiter une « erreur » de Tori, mais de développer le dynamisme d’Uke. A partir de son relâchement, Uke développe sa capacité à aller dans le sens de l’action pour l’amplifier et en sortir...La base des Kaeshi waza n’est autre que le travail neutre (en miroir) évoqué précédemment (Ippan geiko / Kata).